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LADY LUDLOW.

Mais Henri Gregsone avait des dispositions tellement extraordinaires ! Qu’en aurait-il fait, si personne ne les eût employées à quelque chose d’utile ? Ces facultés exceptionnelles auraient été nécessairement dirigées vers le mal ; d’ailleurs, disait M. Horner, c’était en vue du service de milady qu’il avait élevé cet enfant ; il ne pouvait plus suffire à tenir les comptes, à mettre la correspondance au courant, tant les affaires se compliquaient chaque jour.

Lady Ludlow pressentit l’allusion qui allait venir au sujet de cette malencontreuse hypothèque et se hâta de répondre à l’intendant :

« Vous avez raison ; je ne souffrirai pas que vous ayez plus de besogne que vous ne pouvez en faire ; nous en parlerons une autre fois. Quant à présent ; je ne m’inquiète que d’une chose, c’est de remédier à la situation morale de ce pauvre petit Gregsone. Un travail manuel un peu rude ne serait-il pas un excellent moyen de lui faire oublier ce qu’il peut savoir ?

— J’espérais au contraire que Votre Seigneurie m’aurait accordé la permission de continuer ses études, afin qu’il pût me servir en qualité de commis, répliqua le régisseur qui démasqua tout à coup ses batteries.

— En qualité de quoi ? demanda lady Ludlow avec surprise.

— De copiste, de secrétaire ; il a déjà une fort belle main, et calcule avec une rapidité surprenante.

— Monsieur Horner, reprit Sa Seigneurie en se redressant d’un air grave, le fils d’un braconnier, d’un vagabond, n’aurait jamais dû acquérir la faculté de copier des lettres relatives au domaine d’Hanbury, ce qui, dans tous les cas, ne se fera jamais avec ma permission. Je me demande comment il est possible que, sachant l’usage qu’il a fait hier de ses connaissances en lecture, vous osiez