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LADY LUDLOW.

cousins, était d’une pâleur livide, et des mouvements convulsifs agitaient tous ses membres. Il resta quelque temps sans répondre.

« Je le sauverai avec mademoiselle, dit-il enfin, si, en sortant d’ici, elle consent à m’épouser.

— Vous !, s’écria Jacques, c’est impossible.

— Demandez-lui toujours ! » reprit Morin d’une voix râlante.

Au premier mot, Clément fit taire le vieillard, et Virginie l’arrêtant comme il allait s’éloigner : « Répondez à ce misérable qu’il me fait bénir la mort, » dit-elle en souriant au marquis.

Jean Morin baissa la tête et se dirigea vers la porte ; au moment de sortir il s’arrêta et fit signe à Jacques d’approcher.

« Écoutez bien, lui dit-il, le geôlier vous laissera passer demain matin avec ceux des prisonniers qu’on appellera ; tous les deux seront condamnés ; peu importe, je la sauverai, même au pied de l’échafaud, si elle se radoucit à mon égard. Tâchez de la convaincre ; il est si bon de vivre ! Adressez-vous au marquis, il aura sur elle plus d’influence que vous ; il ne peut pas vouloir qu’elle meure ! Je serai au palais de justice, à la place de Grève, j’ai des amis, des partisans ; soyez dans la foule qui suivra les victimes, je saurai bien vous retrouver.

— Sauvez mon maître, répondit le vieillard, et je ferai tout ce qu’il vous plaira.

— Oui, mais à la condition que j’ai dite, » répliqua Morin d’un ton bourru.

Jacques savait bien que cette condition ne serait jamais acceptée ; mais lui, pauvre vieillard, reculait devant la mort, et ne voyait pas pourquoi il laisserait échapper le moyen qui lui était offert de sortir de prison.