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CHAPITRE VIII.

Pierre avait toujours les yeux attachés sur son livre, mais il ne lisait pas ; attentif au moindre bruit, il ne savait plus rien du temps, ni de la réalité ; les sons prenaient à son oreille une puissance inexplicable, depuis les battements de son cœur jusqu’au roulement des voitures qui passaient dans le lointain. Il se demandait si Virginie était arrivée sans encombre au lieu du rendez-vous ; si elle y avait trouvé son cousin ; l’heure devait être passée. Bref, ne pouvant plus y tenir, il résolut d’aller voir quelle tournure avaient prise les affaires. En vain dame Babette, qui s’éveilla tout à coup, lui demanda-t-elle où il courait si vite, le petit Pierre était dehors avant qu’elle eût achevé sa phrase, et ne s’arrêta qu’en apercevant Mlle Canne ; celle-ci marchait d’un pas rapide à côté de Jean Morin, qu’elle s’efforçait d’éviter, et n’aurait pas reconnu Pierre, sans un geste de son fâcheux compagnon. Dès qu’elle eut aperçu le gamin, elle s’empara de son bras, et rendit grâces à Dieu comme si elle eût trouvé un protecteur dans ce marmot de douze ou treize ans.

« Va-t’en, Pierre, s’écria Morin.

— Je ne le peux pas, et ne le veux pas, répondit l’enfant,