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longues promenades aux faubourgs, dans la solitude des rues au quart bâties.

Qu’y avait-il donc de changé dans la vie de Rose, depuis la mort d’Odon, pour qu’elle occupât ainsi, sans répit, sa pensée ? Rien : il n’y avait qu’un malheureux de moins… En quoi cela pouvait-il l’intéresser, lui, Charles ? En quoi ? en quoi ?… il n’eût pas su ou peut-être pas voulu se le dire, au secret de lui-même, mais il se trouvait dans une situation d’esprit et de cœur qui ne pouvait se prolonger, un état trouble où il y avait de l’inquiétude et du malaise ; il avait la confuse sensation de n’être pas d’accord avec la règle et la logique.

Ce fut vers ce temps-là que l’état de Julien, brusquement, empira, que tout le monde, sauf lui peut-être, comprit la Mort si près que le Miracle même, confronté avec elle, serait vaincu. Il ne quittait plus le lit ; il restait de longues minutes abîmé dans des réflexions désespérées, livide, les narines pincées, les dents longues et très blanches dans sa barbe qui poussait librement, les yeux caves et fixes, le front plein de rides et comme agrandi. Il ne parlait presque plus ; il faisait, d’un geste machinal et fatigant, des plis à ses draps ; Cécile vivait dans la terreur de l’entendre demander un miroir.