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CHAPITRE XI


Le lendemain, en se levant, Rose, qui avait fort mal dormi, se regarda attentivement dans son miroir, ce qui ne lui était plus arrivé depuis longtemps, et se dit : « Je suis jolie ». Puis elle se surprit — avec quelque honte dès qu’elle se fut ressaisie — à contempler sa ferme poitrine au galbe puissant, ses bras blancs et ronds, à respirer comme un bouquet épanoui son odeur de femme, faite pour aimer et pour être aimée. Et elle tressaillit au souvenir de la veille ; elle s’effrayait de descendre dans les sentiers inexplorés de son cœur, d’y suivre, à travers l’ombre et le mystère, l’apparition qui s’y était évanouie…

Quand, vers 9 heures, Charles, sérieux et un peu pâle, vint au magasin, suivant son habitude, lui souhaiter le bonjour, ils se comportèrent tous deux comme si rien d’extraordinaire ne s’était passé dans le déroulement habituel de leur existence. Elle lui continua son doux et calme visage. Leur raison se gardait entière : ils étaient suffisamment lucides et forts pour ne pas avoir peur d’eux-mêmes, pour oser