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larmes. Il la berçait, lui entourait la taille d’une étreinte consolatrice, d’une étreinte de protection. Et, soudain, il se sentit un autre homme  : le reste du monde n’existait plus  ; il n’y eut plus sur la terre que cette chair de femme, pâmée contre son corps, chaude de son malheur et de sa tendresse, un contact voluptueux dont il tressaillait inexprimablement  ; il grandissait, les bras vigoureux, la poitrine élargie, dans un orgueil de mâle assez puissant pour dominer l’Avenir.

Et, follement, éperdûment, il la baisa sur les lèvres. Sa longue contrainte pudique, sa fraternelle douceur aboutissaient à ce baiser d’amant…

Mais elle se délivra d’une secousse, affolée, en révolte  :

— Oh  ! Monsieur Charel, Monsieur Charel  ! Non, non, maintenant plus jamais  !

Elle avait donc pensé, avant, qu’un jour elle pourrait être à lui  ?…

Il n’essaya pas de la retenir  ; il dit simplement  :

— C’est vrai, Rose, qu’il serait de tout temps entre nous…

Elle secoua la tête, et, dans un dernier sanglot, essayant de s’affermir  :

— Soyons « braves », dit-elle, en lui tendant la main. Quand on est prop’ avec soi-même…