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Il s’effara :

— On m’a refusé dans mon appartement, gémit-il, mon appartement que j’occupais depuis sept ans. Je ne vous l’avais pas dit, mais c’est pour ça que je m’étais décidé à venir ici.

— Mais si vous veniez chez moi ? fit-elle.

— Chez vous ? cria-t-il en écarquillant ses yeux de fièvre.

— Vous seriez si bien soigné, mon petit Julien, mon « menneke »…

Alors Mme Cécile — elle l’a dit souvent depuis — fut récompensée de son bon cœur : jamais figure de souffrance ne se transfigura ainsi ; tout ce que des yeux peuvent contenir de joie reconnaissante éclaira, comme d’un nimbe, cette pauvre face décharnée ; les bras sortirent de dessous les draps, dans un geste éperdu, deux mains de squelette saisirent les deux grosses pattes de Mme Cécile, les étreignirent avec une force nerveuse qui la stupéfia. Le « menneke » s’était redressé ; il trouva les mots qu’il fallait dire :

— Maman, maman !… Écoutez-moi bien, maman : ce qu’il me faut, c’est qu’on m’aime ; dans quelques jours, chez vous, avec vous, je serai plus qu’aux trois quarts guéri… je vous jure, maman, que je le sens !