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présentaient le Richmond, blond comme la paille de l’avoine mûre, laissant pendre des filaments chevelés ; le Roisin, âpre et roux ; l’Appelterre, foisonnant, couleur d’acajou ; le « fin jaune », en bouffettes frisées et peluchantes ; l’Obourg, poussiéreux et épais ; le Haarlebeke, noir, gras et comme luisant de nicotine.

Des boîtes de cigares ouvraient leurs couvercles, historiés de médailles-récompenses, en colliers et en grappes, de têtes créoles soigneusement coloriées, d’inscriptions espagnoles aux mots en « dor » et en « ja » ; c’étaient les cigares fins qui rendent l’oisiveté légère, donnent des rêves, enveloppent et endorment la tristesse, les cigares dont la fumée a un arôme exotique, pénétrant, subtil et précieux, destiné à se mêler agréablement au parfum concentré des mokas et des liqueurs.

Plus haut, sur les rayons des étagères, des « écumes véritables », élégantes, aux bouts d’ambre clair, pareilles à des bijoux délicats, présentées du bout des pinces par de légers supports métalliques, voisinaient avec des « asbestes » aux tons chauds et polis, avec des « bruyères sculptées » ; un narguilé à carafe de cristal, autour duquel serpentait l’enroulement d’un long tuyau, posait comme une pièce de musée, pour l’œil visionnaire des rapins et des jeunes littérateurs