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conque. La raison peut les condamner ; elle doit les contenir dans de justes bornes ; mais il faut les faire entrer en ligne de compte dans les appréciations économiques, aussitôt que les hommes se montrent disposés à faire des sacrifices pour les satisfaire. Aux yeux du moraliste, une fleur artificielle, une bague, peuvent passer pour des objets inutiles ou futiles ; mais, aux yeux de l’économiste, ils ont de l’importance et de l’Utilité, du moment que des hommes y trouvent assez de jouissance pour faire un sacrifice afin de se les procurer. La satisfaction de la vanité, a dit J.-B. Say, est quelquefois un besoin aussi impérieux que la faim. Il ne faut donc pas confondre l’Utilité, au point de vue économique et scientifique, exprimant la qualité générale des choses, satisfaisant un besoin ou un plaisir quelconque, et l’Utilité, au point de vue moral, exprimant uniquement la satisfaction d’un besoin ou d’un plaisir que la raison et la morale approuvent.

§ III. Définitions de la Richesse, de l’Utilité et de la Valeur. — Classification des Richesses on Biens propres à satisfaire les Besoins des hommes.

6. L’homme fait servir à la satisfaction des besoins inhérents à sa nature et de ceux que la civilisation fait naître en lui[1] :

1° L’innombrable quantité de Matières diverses que la nature met à sa disposition et qu’il façonne de mille manières :

2° Les Services que d’autres hommes sont susceptibles de lui rendre en échange de ses services, ou bien encore le Travail que d’autres hommes font pour lui en échange d’avantages analogues.

Tout Produit, Travail ou Service qui satisfait les besoins de l’homme, besoins du corps ou de l’esprit, besoins physiques ou moraux, est ce qu’on appelle la Richesse[2], quelle qu’en soit la quantité. — Un clou est de la richesse ; un hectolitre de blé est de la richesse ; la faculté qu’a le professeur de savoir donner une leçon est de la richesse comme la leçon, comme le résultat de cette leçon, etc. — En économie politique, le sens du mot Richesse est donc plus étendu que dans le langage ordinaire, où Richesse est pris dans le sens d’opulence et d’abondance de biens matériels[3].

  1. Les besoins, les fantaisies, les plaisirs matériels et intellectuels.
  2. De la racine tudesque Rik ou Reich, supériorité, puissance. — « Richesse, c’est pouvoir. (Hobbes.)
  3. Il y a des économistes qui prennent le mot Richesse dans le sens restreint