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six semaines dans un phare.

lui parler du passé, du présent et de l’avenir de Royan. Ce qu’il lui fallait puisqu’il avait la liberté, c’était le grand air.

Pourtant il est des spectacles qui ont beau être familiers à votre vue, vous ne pouvez vous en détacher facilement. Les conches de Royan sont de ce nombre. Figurez-vous des plages en pente douce et d’un sable fin comme l’ambre, chauffé à mer basse par le soleil offrant aux baigneurs des bains de différentes qualités. Là, les lames expirent doucement ; ici elles déferlent avec fureur. Il y en a pour tous les goûts. Paul fit comme les autres. Il se baigna et se serait même baigné avec son fusil, s’il avait pu. Quand il fut fatigué de se baigner, il reprit son excursion commencée et ne revint pas à Royan, où son Lefaucheux lui était inutile. Avant d’aller en mer, il obtint des deux marins qu’ils l’accompagneraient à pied dans les environs de Saint-Georges et le long des côtes. Nous le retrouvons avec son Lefaucheux, l’un portant l’autre, d’abord à la pointe de Suzac, où il pêcha des moules, et dans la charmante conche des dames, où il ne put s’empêcher de prendre un nouveau bain.

De Suzac à Saint-Georges, la promenade est charmante par une belle nuit d’été, les lames phosphorescentes font jaillir du sable des milliers d’étincelles, tandis qu’au loin la tour de Cordouan, à moitié noyée dans l’ombre, tourne et retourne son disque de feu.

Le lendemain Paul et ses hôtes allaient dans leur bateau jusqu’à Meschers, où l’oncle fit au neveu un petit cours d’histoire. C’est là, en effet, que le vaisseau le Régulus, traqué par une flotte anglaise, vint terminer sa glorieuse carrière.

— Il fallait se rendre ou périr, disait le vieux marin. Le capitaine, d’accord avec son équipage, prit le parti héroïque de brûler son navire. Il jeta les poudres à la mer et alluma la chemise soufrée. La flamme envahit bientôt le vaisseau de la Sainte-barbe au haut des mâts ; les canons encore chargés partaient l’un