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antenolle.

une tête, puis cette tête s’enfonçait, et un filet de sang en marquait la place. Ce n’était pas plus rassurant pour nous que pour eux. Les requins ne quittaient pas de vue le bâtiment échoué.

Mais quand les nègres s’aperçurent que nous avions pris le canot, ils crurent qu’on allait les abandonner. Dominés par la peur, insensibles à notre voix, ils nous accablèrent d’injures et, nous menaçant de mort, ils recommencèrent la lutte.

Nous étions désespérés. Le lieutenant reste stationnaire à quelques brasses de la Blanchette, car les nègres veulent envahir le canot, mais sur un ordre du capitaine, il accoste le couronnement en ayant soin de déguiser son évolution pour leur donner le change.

En effet, on dirige le canot sur l’avant du navire, où les noirs se portent en foule pour se saisir de notre embarcation, mais l’officier tourne et accoste la poupe avant qu’ils puissent se douter de son dessein. Le capitaine et un matelot sautent dans le canot qui prend le large ; mais à peine les nègres qui attendaient à l’arrière s’en furent-ils aperçus qu’ils crurent qu’on les abandonnait définitivement et se jetèrent à la mer pour se mettre à notre poursuite. Le canot prend chasse devant eux.

Mais un nègre plus agile est parvenu à le rattraper. En désespéré, il s’accrocha à l’arrière, et pendant que le matelot tient la voile que le vent déchire, le capitaine enjoint au nègre de se retirer, et sur son refus, lui casse la tête d’un coup de barre. À ce moment, deux autres matelots les rejoignent et, grâce à ce renfort, la barque par une habile manœuvre échappa aux autres nègres.

Peu à peu le nombre de ces malheureux diminue. Les uns sont trahis par leurs forces, les autres deviennent la proie des requins. À chaque restant un cri retentit, une malédiction est adressée au capitaine, et un homme disparaît. Sur la Blanchette,