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six semaines dans un phare.

Nous mîmes de côté aussi beaucoup de nids d’hirondelles, des œufs salés et du riz, sans oublier l’eau-de-vie.

— Les œufs salés, s’écria Chasse-Marée, jamais je n’en avais entendu parler.

— Grand-papa, répondit Rabamor, c’est tout simplement des œufs bouillis dans l’eau salée ; le sel pénètre la coquille et les conserve ainsi pendant de longues années. C’est chinois, mais ce n’en est pas plus mauvais pour ça.

Quand nos bateaux furent pleins de marchandises, nous songeâmes à nous retirer, mais à ce moment-là, les Chinois se réveillèrent et voulurent être payés. C’est à ce moment-là aussi que nous sortîmes nos armes cachées, et que devant notre attitude, ils ouvrirent une bouche large comme une écoutille, et, se précipitant à la manœuvre pour s’enfuir, ils allèrent chercher dans d’autres mers, un autre bâtiment assez bête pour se laisser arrimer.

Le capitaine était un honnête homme…

— Oh ! firent tous les marins d’un commun accord. Paul et le père Vent-Debout se contentèrent de sourire. Clinfoc approuvait d’un signe de tête le récit de Rabamor.

— Oui, un honnête homme ! Chacun de nous eut sa part de la vente des ballots de soieries ; nous en retrouvâmes même un propriétaire qui nous donna une bonne gratification quand nous lui ramenâmes sa marchandise. Mais je continue, ou plutôt je commence le récit promis à M. Paul et dont l’histoire du bateau chinois m’a éloigné.

Nous fîmes voile vers l’île de Bornéo ; au moment de gagner la terre, le vent s’abaissa tout à fait, et nous restâmes stationnaires durant quatre jours. Pendant cet arrêt, nous perdîmes un de nos meilleurs matelots. Voici comment :

Attaché par des cordes et suspendu au-dessus de la proue sur laquelle il clouait un morceau de cuivre, cet homme jeta tout