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cartahut.

La flotte doit y prendre part en faisant une diversion sur les forts maritimes, mais la mer grossit et la brise devient plus fraîche : il nous est impossible d’appareiller. Seules, quatre bombardes établies dans la baie de Streletska canonnent le fort Alexandre et la Quarantaine.

Eh bien ! vous me croirez si vous voulez, mais le mauvais temps qui empêcha la flotte de canonner les forts, favorisa l’attaque de nos troupes en trompant l’ennemi. En effet, plusieurs officiers russes faits prisonniers nous rapportèrent que, prévenus qu’un mouvement important de la flotte serait le signal de l’attaque décisive, ils n’avaient pas cru à un assaut définitif, ne voyant pas nos vaisseaux s’embosser devant les forts !

Nous sommes au 8 septembre ! toute la nuit notre artillerie a tiré sans relâche. Le feu des Russes est éteint, mais derrière leurs abris casematés, on voit d’innombrables bataillons, des batteries en réserve qui guettent le moment de l’assaut.

Il est midi. Au loin, on voit le général Pélissier, entouré de son état-major, donner ses derniers ordres. Le général Bosquet, placé sous les feux convergents de l’ennemi, attend le signal. Les Anglais attaquent le grand Redan. Mais chacun a l’œil fixé sur le bastion Malakoff contre lequel nos troupes s’élancent. L’amiral Rigaut de Genouilly, avec ses batteries, domine seul le siége, et continue jusqu’au dernier moment de tirer sur l’ennemi, sans craindre d’atteindre les Français qui se développent sur le chemin découvert entre les tranchées et Malakoff.

Comme nous attendions avec anxiété l’apparition de notre drapeau sur les parapets ennemis ! Si nous avions su ce que nous coûterait la victoire !… Si nous avions pu assister à ce sanglant combat ! Ce qui se passait là-bas, au loin, dans la fumée était terrible. Jugez-en.

Le 1er  zouave et le 7e de ligne sont sortis les premiers, le général Mac-Mahon en tête. Ils se précipitent sur le saillant de