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cartahut.

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chargé d’aller porter des dépêches à Sébastopol et qui affirma que cette ville était imprenable par mer.

Cependant nous reçûmes l’ordre de croiser sur les côtes de Crimée et de bloquer la marine russe dans ses ports. C’était déjà quelque chose, mais le froid empêcha nos explorations. Odessa était entourée de glaces, et nous ne fîmes que montrer nos couleurs nationales devant Sébastopol. Pendant ce temps, l’escadre de l’Océan amenait de France une armée toute prête à faire sur terre ce que nous ne pouvions faire par mer, et nos bâtiments malgré le froid et les neiges exploraient toutes les côtes.

Ah ! nous avions affaire à forte partie. La côte était hérissée de forts partout où on pouvait opérer un débarquement. Quand nous approchions trop près, les Russes faisaient sauter les forts et disparaissaient dans les bois. Toujours le même système. Semer la ruine et la misère entre eux et l’ennemi. Depuis l’incendie de Moscou, ils n’en ont pas d’autre.

Comme je vous l’ai dit, les troupes arrivaient avec l’escadre de l’Océan et devaient débarquer à Gallipoli ; mais avant leur arrivée, notre flotte apprit officiellement la déclaration de guerre de la France et de l’Angleterre à la Russie, car jusqu’à cette époque, 15 avril 1854, nous n’avions fait que nous promener, histoire de dire à l’ennemi : « Attention, nous sommes là ! »

Ce fut un beau spectacle. Un peu avant midi les escadres française et anglaise sont réunies ! Chaque équipage est rangé sur le pont et apprend de son commandant la grande nouvelle qui porte la joie dans tous les cœurs. Midi sonne. Le signal de guerre à la Russie est arboré aux mâts des vaisseaux amiraux. Ce ne sont alors qu’acclamations répétées qui s’appellent et se répondent. Sur nos bâtiments, le pavillon anglais flotte au grand mât, sur les navires anglais, c’est le pavillon de la France. Le pavillon turc est aux mâts d’artimon, le pavillon national est aux mâts de beaupré et de misaine. Des matelots désignés à l’avance se