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six semaines dans un phare.

prendre, ce qui augmenta la confiance des sauvages et endormit la méfiance des Français, car, dès le moment qu’on commença de s’entendre, les bâtiments lièrent des relations d’amitié avec les indigènes. Il y eut de ces derniers qui couchèrent à bord ; parmi eux était le chef Takouri. Quand on réfléchit quels étaient déjà ses projets, on ne peut qu’admirer la force de caractère de ce sauvage, qui ne se confiait ainsi à des ennemis que pour mieux s’en venger plus tard.

Ce ne fut pendant une semaine qu’échange de cadeaux, de poignées de mains et de frottement de nez, politesse exquise de messieurs les sauvages.

Dans l’enceinte même du port où les Français avaient jeté l’ancre, se trouvait une île avec une anse très-abordable où il y avait de l’eau et du bois en quantité. Le capitaine y fit dresser des tentes, y transporta les malades et y établit un corps de garde. De tous les points de l’île arrivèrent des naturels encore plus affectueux, apportant du poisson et des fruits, se montrant sans défiance, doux et caressants.

Je ne vous ai pas dit le nom des deux officiers. Ils sont importants, car ils appartiennent à la géographie. Le capitaine s’appelait Marion et le lieutenant, Crozet. Le premier avait pris peu à peu confiance entière dans les sauvages, le second se tenait sur la réserve.

Un jour Takouri pressa le capitaine de descendre à terre. Celui-ci devait bien lui rendre une fois à son village les visites qu’il en avait reçues à son bord. D’ailleurs les deux bâtiments avaient besoin de mâts de rechange, et il y aurait eu stupidité à ne pas utiliser la bonne volonté des Zélandais.

Le capitaine Marion, le lieutenant Crozet et deux tiers de l’équipage descendirent à terre et se disséminèrent en trois camps sur une distance de deux lieues ; le premier, près de la mer, était l’atelier, la forge et l’ambulance, défendu par