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récit de chasse-marée.

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de chasse, sont continuellement couvertes par nos matelots qui passent chez les Anglais. Quelques-uns tombent dans ce dangereux passage, mais pas un ne recule.

Nous sommes maîtres du gaillard d’avant. Ce n’est que le lieu du champ de bataille. La foule des Anglais entassés sur les passavants est impénétrable. Le capitaine, comprenant qu’il a affaire à des adversaires sérieux, se met à la tête de son équipage. Cette fois le combat devient terrible, mais notre capitaine, lui aussi, est sur le pont. Son bras frappe et sa bouche commande. Bientôt une barricade de cadavres nous sépare des Anglais. Cette redoute humaine nous arrête et nous entoure sous le feu des ennemis juchés sur leurs drômes et derrière le fronton de leur dunette.

Le capitaine voit le danger. Un moment d’incertitude, et tout est perdu. Il ordonne à nos hommes restés sur le gaillard d’avant de charger à mitraille deux canons jusqu’à la gueule et de les braquer sur l’arrière. Déchargées rapidement sur un signe du capitaine, ces pièces jonchent de débris humains les passavants, les deux bords du gaillard d’arrière. Nous nous relevons vivement, car on s’est jeté par terre pour laisser passer la mitraille, mais les rangs des Anglais se sont remplis comme par enchantement.

Et pourtant Dieu sait s’il en tombe ! mais de nouveaux combattants arrivent, sans que nous puissions, comprendre d’où ils sortent ! On n’entend que des cris de fureur, des coups de hache, des cliquetis de bâtons. Plus d’armes à feu ! Seules nos grenades, lancées par des gabiers, tombent au milieu des Anglais et tuent leur capitaine. Le nôtre, au premier rang, se jette tête baissée sur l’ennemi. Sa hache tournoie et fait le vide autour de lui ! Nous sommes maîtres du gaillard d’avant et de la dunette, que les Anglais épouvantés abandonnent.

La lutte semble terminée. Pas encore. Les Anglais réfugiés dans la batterie font pointer en contre-bas des canons de dix-