Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/82

Cette page n’a pas encore été corrigée

encore était-il fortement question du départ de cette corvette pour la France.

Pendant mon séjour à l'île de France, M. Bruneau de la Souchais me présenta au capitaine l'Hermite, qui se rappela parfaitement notre dîner à Rochefort, chez mon cousin Beaulieu-Leloup, et me témoigna toute la satisfaction qu'il éprouverait de me posséder à son bord. Il voulut bien même ajouter en souriant que si je m'embarquais sur la frégate il me nommerait son premier peintre de marines, sans préjudice de l'avancement auquel j'étais en droit de prétendre. Quelques jours après cette conversation, l'Hermite reprit la mer, et revint avec deux gros et riches vaisseaux qu'il avait enlevés à la Compagnie des Indes sur la rade de Talichieri.

Ces prises, vendues avec d'autant plus de bénéfice que depuis longtemps la concurrence n'existait plus, mirent de l'argent dans la poche et par conséquent de la gaieté dans le cœur de l'équipage de la Preneuse, qui se prépara à se dédommager, par une orgie monstre, des privations si suivies et si constantes endurées jusqu'alors !... Hélas ! ce projet ne devait pas se réaliser ! L'Hermite, obligé de se multiplier pour suppléer aux forces qui manquaient, reprit la mer, presque aussitôt après son arrivée.


Comme son équipage n'était plus au complet, il prit à bord de la Brûle-Gueule, sur le point de retourner en France, le plus d'hommes qu'il put : inutile d'ajouter que je ne laissai pas échapper une si belle occasion de servir sous les ordres d'un homme tel que l'Hermite, et que je m'empressai de m'embarquer sur la Preneuse.

Si j'eusse voulu cependant écouter les conseils du brave et célèbre capitaine de corsaire Dutertre, dont j'avais fait depuis peu la connaissance, je serais resté à terre.