Page:Garneray - Voyages (Lebègue 1851).djvu/41

Cette page n’a pas encore été corrigée

Le soir même, je me trouvai du même quart que mon matelot.

— Voyons, matelot, lui dis-je, à présent que rien ne nous presse, et que nous sommes seuls, raconte-moi donc un peu ce qui s’est passé tantôt entre toi et mon cousin…

— Bah ! des bêtises; c'est pas la peine d'en parler !…

— Qu'importe ! puisque cela m'intrigue. Voyons, je t'écoute.

— Sapristi ! vieux, me dit le Breton en coupant court à la conversation, quelle chance si nous nous trouvions réunis tous les deux un jour sur un navire commandé par Surcouf !… Hein ! aurions-nous de l'agrément ?…

— Je n'en doute pas ; mais il ne s'agit point de cela pour le moment…

— Tu connais Surcouf de nom, n'est-ce pas ? En voilà un qui ne gaspille pas son temps, et qui sait vous saisir l'occasion aux cheveux quand elle se présente !…

— Je n'ai jamais prétendu le contraire…

— C'est la crème des bons garçons…

— Ah ça, m'écriai-je avec impatience, est-ce que nous allons longtemps louvoyer comme cela, matelot ? Je croyais que les Bretons n'étaient pas des Bas-Normands, et que quand on leur demandait la vérité ils ne faisaient point tant de façons pour vous la dire… Je vois que jusqu'à ce jour je m'étais trompé sur le compte de tes pays… À présent, je saurai que ce sont des chicaniers, et pas autre chose…

— Ah ! sacré mille noms, c'est pas vrai, ça ! le Breton ne ment jamais…

— Possible… mais il se tait…

— Dame ! il se tait… crois-tu donc que ce soit toujours chose facile de parler, toi ?