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lui saute à la gorge, et essaie inutilement de le frapper de son poignard, lorsque le nègre Bambou, croyant que la vie de son chef est en danger, cloue d’un coup de lance l’infortuné midshipman dans les bras de Surcouf, qui reçoit son dernier soupir. L’expédition de la batterie terminée, nous remontons, Surcouf en tête, sur le pont ; le combat a cessé partout.

— Plus de morts, plus de sang, mes amis ! s’écrie-t-il. Le Kent est à nous ! Vive la France ! vive la nation !

Un immense hourra répond à ces paroles, et Surcouf est obéi : le carnage cesse aussitôt. Seulement nos matelots excités par le combat se souviennent de la promesse qui leur a été faite avant l’abordage : ils ont droit à deux heures de la part du diable ! Ils s’élancent donc dans l’entrepont, et se mettent à enfoncer et à piller les coffres et les colis qui leur tombent sous la main.

Surcouf, qui entend les plaintes que poussent les malheureux Anglais en se voyant dépouillés de leurs effets, devine ce qui va se passer, et un nuage assombrit son front. Il est au moment de s’élancer, mais il se retient.

— La parole de Surcouf doit être toujours une chose sacrée mes amis ! nous dit-il en étouffant un soupir.

Quelques minutes s’écoulent et le bruit continue ; seulement cette fois des cris de femmes se mêlent aux clameurs des pillards.

— Ah ! mon Dieu ! j’avais oublié la plus belle partie de notre conquête, nous dit Surcouf. Allons à leur aide, mes amis…

Nous suivons aussitôt notre capitaine, et nous arrivons