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humain, on se déchire, on se mord, on s’étrangle !

Je devrais peut-être à présent décrire quelques-uns des épisodes dont je fus alors le témoin, mais je sens que la force me manque. Les nombreuses années qui se sont écoulées depuis l’abordage du Kent, en retirant à mon sang sa fougue et sa chaleur, me montrent aujourd’hui sous un tout autre aspect que je leur trouvais alors, les événements de mon passé.

Je demanderai donc la permission de passer sous silence, souvenirs douloureux pour moi, les combattants qui, aux prises sur les pavois du Kent, tombent enlacés à la mer et se poignardent d’une main, tandis qu’ils nagent de l’autre ; ceux encore qui, lancés hors du bord par le roulis, sont broyés entre les deux navires. Je reviens à Surcouf.

Le tenace et intrépide Breton a réussi ; il s’est enfin emparé du gaillard d’arrière et de la dunette. Les Anglais épouvantés de son audace ont fini par lâcher pied et se précipitent dans les écoutilles, hors du bord, dans les panneaux, sous les porte-haubans et surtout dans la dunette.