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les îles de Sumatra et de Java, qui resserrent entre leurs bords les eaux bleuâtres du détroit de la Sonde. Bientôt nous mouillâmes, pour remplacer le bois et l’eau dont nous nous étions dégarnis en faveur du navire hollandais, dans la délicieuse baie de Cantaïe. Cette baie ouverte est encadrée dans un paysage ravissant, et le gibier y abonde. Nous y restâmes un seul jour.

Le lendemain de notre départ, nous capturâmes un trois-mâts américain que l’on expédia à l’île de France. Son capitaine nous apprit la présence de la frégate de sa nation l’Essex sur la rade de Batavia, dont nous étions éloignés alors d’environ vingt lieues ; cette fâcheuse nouvelle dérangea complètement notre plan de campagne. Au lieu d’établir notre croisière dans les parages où nous nous trouvions, en attendant que la saison nous permît d’affronter le golfe et les brasses du Bengale, nous cinglâmes vers l’archipel des Seychelles. Surcouf comptait attendre là la fin de la mousson du N.-O., et gagner ensuite les bouches du Gange.

Vers le milieu du mois d’août nous appareillâmes de Sainte-Anne, où nous perdîmes trois de nos hommes qui périrent, sous nos yeux, dans le chavirement d’une pirogue, dévorés par les requins, et nous parvînmes enfin à l’endroit choisi par Surcouf pour établir notre croisière.

Surcouf, chacun avait fait et s’était communiqué cette remarque, semblait depuis quelques jours inquiet et préoccupé. Nous le voyions à chaque instant consulter de sa longue-vue l’horizon désert, et donner des signes d’impatience et de colère.

Nous nous trouvions à l’est de Ceylan, quand nous aperçûmes une goélette danoise portant un pavillon jaune au mât de misaine. À cette vue, qui n’avait cependant rien de bien intéressant pour nous, Surcouf poussa un énergique juron