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— Mes renseignements ! se hâta d’ajouter le capitaine danois.

— Non, de votre espionnage, reprit durement Surcouf.

— Capitaine, cette parole et celle de pot-de-vin que vous avez employées si légèrement déjà à mon sujet, interrompit le consul d’un air indigné, donnent à notre entrevue un tour que je ne puis supporter.

— Ah bah ! je me moque pas mal de toutes vos manières, moi ! s’écria Surcouf d’une voix tonnante. Croyez-vous bonnement que je vais perdre mon temps à vous raconter des douceurs ? J’ai besoin d’un traître et d’un espion. Je vous dis à vous, monsieur le consul, voulez-vous être mon traître ? À vous, capitaine, voulez-vous être mon espion ? Ce langage est clair, c’est l’essentiel ; j’adore la clarté. À présent, un mot, et remarquez que de ce mot dépend votre fortune. Oui ou non ? Si c’est non, bonsoir : je m’en vais de ce pas trouver des gens plus intelligents que vous et qui ne refuseront pas leur bonheur. Voyons, monsieur, à vous, répondez.

— Oui, capitaine, dit le consul ; seulement, je vous en supplie, permettez-moi de vous adresser une demande.

— Voyons cette demande.

— C’est que vous m’engagiez votre parole d’honneur que vous ne parlerez à personne au monde de notre transaction.

— Je vous la donne ; à présent, à votre tour de répondre, capitaine, s’il vous plaît.

— Oui ! s’écria le Danois ; seulement…

— Rien de plus ; c’est assez : affaire conclue ; au revoir.

Surcouf alluma alors son cigare, et s’en fut sans ajouter un mot. Je le rejoignis au bas de l’escalier.