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coups de fusil à travers les écoutilles, et, rechargeant leurs canons, recommencent leur feu contre l’Amphitrite. Une partie de nos matelots se précipite alors aux pièces, et la canonnade continue comme avant l’abordage.

Cependant, nous sommes toujours maîtres du pont de la corvette et nous y avons arboré les couleurs françaises.

Passé le premier moment de stupeur que nous a causé cet acte de folie, presque de trahison, nous nous empressons d’abattre les mantelets de sabords et nous claquemurons ainsi les Anglais dans leur propre batterie ; mais quel n’est pas notre étonnement lorsque nous voyons que l’équipage de la corvette n’interrompt pas pour cela son feu, et qu’il tire à travers les mantelets des sabords baissés, au risque presque certain d’incendier en même temps le Trinquemaley et l’Amphitrite !

— Malédiction ! s’écrie Maleroux. Je crois que j’aurais bien fait, Duverger, d’exécuter le massacre que vous m’avez proposé tout à l’heure ! Comment expliquer cette stupide et inconcevable conduite des Anglais ? Qui peut la produire ? L’ivresse, la folie, le désespoir ? C’est à n’y rien comprendre ! Quoi ! nous faisons grâce de la vie à plus de trente d’entre eux, nous sauvons ceux qui se noient, leur pavillon, arraché de sa place d’honneur, gît à nos pieds, et ils osent nous attaquer d’une façon si déloyale ?.. Il faut pourtant en finir avec eux !…

Nos frères la Côte, à qui cette stupide agression a rendu toute la fureur, se préparent à entrer dans la batterie et à y massacrer tous les Anglais qui s’y trouvent, lorsque des cris affreux qui s’y font entendre les arrêtent dans leur élan.

Bientôt une clarté qui se projette au large par toutes les ouvertures de la corvette succède à ces cris. Le feu est à bord du Trinquemaley.

— Capitaine, retournons sur l’Amphitrite, et tâchons