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VII

L’absence de l’interprète Carvalho dura près d’un quart d’heure, et nous allions, mes deux matelots et moi, nous mettre à sa recherche ou à sa poursuite, lorsque nous le vîmes enfin revenir   ; il avait l’air profondément abattu.

—  Ah   ! seigneuries, s’écria-t-il d’un ton lamentable, notre position devient de plus en plus critique   ! Pendant que je causais tout à l’heure avec vous de nouveaux malheurs sont survenus à votre suite   : trois hommes ont encore été mordus par des serpents, deux saisis par les caïmans, et un, en glissant, s’est cassé la jambe. De vos dix Malgaches, il n’en reste donc plus que deux de valides. Il est impossible, vous le voyez, que nous continuions notre chemin.

Ces malheurs si subits étaient réellement par trop invraisemblables pour que je pusse y ajouter foi un seul instant   ; je fis donc un signe convenu entre nous à mes matelots, et aussitôt François Poiré et Bernard s’élançant le premier à la gorge du Portugais, et le second le saisissant à bras-le-corps, le terrassèrent à mes pieds.

Cette agression avait été si rapide, si imprévue, que le Portugais en fut frappé de stupeur et d’effroi.

—  Carvalho, lui dis-je, ta dernière heure est arrivée… je vais te brûler la cervelle   !

—  Ah   ! grâce, seigneurie   ! s’écria-t-il en proie à une frayeur extrême… ne me tuez pas, et je ferai tout ce que vous m’ordonnerez.