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n’étaient pas comptés ; mais je me suis engagé auprès de la reine à être de retour dans cinq jours, et, comme je ne voudrais, pour rien au monde, manquer à ma promesse, je ne puis différer mon départ… Veuillez lui exprimer toute ma reconnaissance pour son aimable invitation.

Grâce à cette marque de faveur que la reine venait de m’accorder publiquement, et à l’attrait puissant, sans doute, de la hideuse cérémonie qui allait s’accomplir, la foule abandonna bientôt l’intérieur de la paillote, et je m’empressai de sortir de Bombetoc.

Nous achevions de franchir le pont-levis dont j’ai déjà parlé quand un Malgache de courte et épaisse corpulence se jeta dans les bras de l’interprète portugais, l’embrassa tendrement, et lui demanda une bouteille d’arack que je venais de lui donner, et qu’il portait attachée à la poignée de sa ridicule rapière. Carvalho s’empressa de se rendre au désir du Malgache, qui vida presque entièrement, d’un seul trait, le contenu du flacon, et s’en fut aussitôt après, sans plus de cérémonie.

— Quel est donc cet homme, Carvalho ? demandai-je en portugais.

— C’est mon frère, seigneurie, me répondit-il.

— Votre frère ! Ma foi, je n’aurais jamais deviné cela… Vous vous ressemblez bien peu.

— Ce n’est pas étonnant, cet homme n’est mon frère ni par mon père ni par ma mère.

— Ah bah ! Et comment l’est-il donc, alors ?

— Il l’est par le sang, seigneurie.

— Je ne vous comprends pas. Expliquez-vous mieux !

— C’est que vous n’êtes pas au courant des mœurs de Madagascar. Ici, quand on veut devenir le frère de quelqu’un,