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et aigus de ces affreux insectes, ne présentait plus qu’un tatouage.

Un ennemi plus terrible encore, non pas à combattre, car cela eût été malheureusement impossible, mais à supporter, que les moustiques, c’était une quantité prodigieuse de grosses et longues fourmis rouges qui couvraient en entier les feuilles des buissons. Chaque fois que le terrain fangeux et glissant que nous foulions nous forçait, en nous faisant perdre l’équilibre, de nous rattraper aux branches des arbrisseaux, nous recevions comme une pluie de fourmis dont chaque goutte nous laissait une blessure sur le corps.

Ces piqûres étaient tellement douloureuses, que nous fûmes forcés, Bernard, Poiré et moi, de nous jeter à plusieurs reprises dans les grandes flaques d’eau que nous rencontrâmes, afin de nous débarrasser des fourmis qui, joignant la gourmandise à la vengeance, étaient restées attachées à notre corps. Cela nous exposait, il est vrai, à tomber dans la gueule de quelque crocodile ; mais entre deux maux, nous préférions choisir le plus éloigné et le plus incertain ; or, je dis ceci sans aucune exagération, s’il nous eût fallu subir les ravages des fourmis cramponnées à notre chair, nous fussions devenus fous furieux !

Deux heures avant le coucher du soleil, nous entrâmes dans une plaine recouverte de fougères gigantesques, dont le feuillage cachait de profondes crevasses, d’énormes déchirures du sol. Aussi n’avancions-nous qu’avec une extrême lenteur.

Nos conducteurs et l’interprète Carvalho nous montrèrent dans cette plaine l’arbre qui produit le rabinesara, le fruit le plus délicieux que l’on puisse s’imaginer, et que les indigènes font entrer dans presque tous leurs ragoûts et dans leurs