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avec un accent qui trahissait son origine anglaise, j’aperçois ici, si je ne me trompe, un des combattants de la Preneuse que j’ai vu débarquer tantôt sur la plage. Seriez-vous assez bon pour vouloir bien me faire l’honneur de me présenter à lui ?

M. Montalant s’empressa d’obéir à ce désir, et s’avançant, suivi du jeune homme, vers moi :

— Monsieur Green, dit-il, je vous présente M. Garneray, l’un des marins de la Preneuse… Monsieur Garneray, M. Green, lieutenant de vaisseau au service de Sa Majesté Britannique.

Nous nous saluâmes, l’officier et moi ; et celui-ci m’adressant aussitôt la parole à haute voix et de façon à pouvoir être entendu de tout le monde :

— Je crains bien, monsieur, me dit-il, d’être arrivé ici en importun, au moment où vous racontiez le combat d’aujourd’hui… Que ma présence, je vous en conjure, ne vous fasse pas suspendre votre récit. La France et l’Angleterre, quoique rivales, possèdent toutes les deux d’assez riches souvenirs de gloire pour n’avoir rien à s’envier. Quant à la conduite du capitaine l’Hermite et à l’héroïsme montré par votre équipage, ce sont là des faits évidemment si glorieux, que vous ne pouvez me blesser en rien dans ma fierté nationale en les retraçant devant moi. Je ne suis pas anglais seulement, monsieur, je suis aussi homme de guerre, et les belles actions trouvent toutes et toujours un écho dans mon cœur.

Le lieutenant Green, après avoir prononcé ces paroles, qui furent parfaitement accueillies par l’assemblée, s’assit près de moi et me donna à comprendre, par son air grave et recueilli, qu’il était prêt à m’écouter : je repris mon récit interrompu.

Lorsque j’eus terminé au milieu de l’attendrissement général, M. Green se retournant vers moi :