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place où je suis… au banc de quart. Je voudrais… je voudrais que l’on me laisse sur la frégate… Me le promettez-vous ?

— Oui, Graffin !… vos derniers souhaits seront fidèlement et religieusement exécutés, répond le capitaine, je vous le jure…

— Merci… capitaine… Oh !… si jamais… si jamais… vous voyez ma bonne mère… dites-lui… que… que… je suis tombé… comme doit tomber un officier français… la face tournée vers l’ennemi… que j’ai pensé à elle, que je n’ai pas souffert !…

L’enseigne s’arrêta un moment, puis reprit en se retournant vers les cinq officiers ses collègues :

— Merci, messieurs, de l’amitié que vous m’avez toujours témoignée… Au fait, j’étais réellement un bon… un bon garçon… J’ai bien l’honneur… de vous saluer…

L’infortuné jeune homme en prononçant ces derniers mots essaya de sourire, mais ses traits, contractés par la souffrance, trahirent sa volonté. Quelques soubresauts nerveux agitèrent son corps, et sa tête s’affaissa sur le pont tandis qu’il murmurait encore :

— Les couleurs nationales… ma mère… capitaine… la Preneuse !

Il était mort !

— Monsieur Dalbarade, dit l’Hermite, je ne me sens pas bien ; peut-être vais-je rejoindre notre camarade… Promettez-moi que vous exécuterez à la lettre ses dernières volontés.

Le capitaine ferma alors les yeux pendant quelques secondes, puis relevant tout d’un coup brusquement la tête :

— Dalbarade ! s’écria-t-il en essayant de se dresser sur ses pieds, je vous le répète pour la dernière fois : accordez-