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— Que me dites-vous là, capitaine ! s’écrie l’enseigne avec une émotion profonde.

— La vérité. Tout est disposé pour incendier la frégate !

— Incendier la frégate, capitaine !… Ah ! voilà qui est bien… merci…

Puis, après quelques secondes :

— Mais qui mettra le feu, capitaine ?

— Moi, monsieur, qui veux, vous entendez, qui veux rester seul et le dernier à bord. Partez… Une embarcation restera pour me recueillir… Encore une fois, partez ! vous dis-je…

— Partir, capitaine ! partir lorsque les boulets et la mitraille de l’ennemi pleuvent sur nous !… Partir en vous abandonnant… nous, vos officiers… jamais ! s’écrie l’enseigne avec une énergie pleine de sensibilité.

— Non, jamais !… répètent les autres officiers, M. Dalbarade en tête, jamais !…

L’Hermite, en présence de ce dévouement, est attendri : une larme tremble dans ses cils.

— Eh bien, restez, messieurs, répond-il brusquement en se retournant vers son état-major. Au fait, vous êtes dignes de cet honneur.

Les six officiers qui sont près de lui en ce moment le remercient avec effusion de cette permission. Graffin est radieux.

Soit que la réaction produite par les efforts surhumains qu’avait faits l’Hermite pour dompter sa fièvre commençât à se déclarer, soit que la douleur de voir le navire confié à sa responsabilité succomber dans la lutte lui eût causé une angoisse trop vive, soit enfin que la défaite fût sonnée, toujours est-il que l’Hermite, malgré ses