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retombera la responsabilité de la décision que vous allez prendre. À présent, voici ma position : jugez avec réflexion, et prononcez-vous ensuite avec franchise. Mes instructions, reprit l’Hermite après une légère pause, sont d’autant plus précises, rigoureuses, que la Preneuse étant en ce moment le seul navire que possède la France dans les mers des Indes pour défendre les intérêts de son commerce et tenir en respect l’ennemi, on est en droit d’attendre et de compter beaucoup sur nous.

Mes instructions portent que, tant que des avaries ne compromettront pas d’une façon évidente le salut de la frégate, tant que nous aurons encore assez de munitions pour soutenir un combat, un nombre de canonniers suffisant pour le service des pièces, nous devons tenir la mer. À présent, messieurs, prononcez-vous hardiment ! Pensez-vous, en votre âme et conscience, que si demain nous rencontrions l’ennemi, nous en serions réduits à amener nos couleurs sans les défendre ; que si le combat s’engageait nous n’aurions pas une chance, au moins minime, d’en sortir victorieux ? Quant à moi, je réponds : Non, nous n’en sommes pas réduits à craindre pour l’honneur de notre pavillon ; non, nous ne fuirions pas l’Anglais ; non, il ne serait pas sûr de nous vaincre !

— L’Anglais nous battre, et nous battre lorsque vous nous commandez ! capitaine, s’écria Graffin avec feu et d’un air indigné, c’est là une supposition qu’en croyant même aux choses fabuleuses et impossibles, on ne peut admettre.

— À présent, messieurs, continua l’Hermite sans paraître remarquer l’interruption du jeune enseigne, prononcez-vous ; je vous répète que j’accepterai votre décision.

— Capitaine, répondit le lieutenant en pied, nous vous remercions de tout cœur des explications