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et il conserve toujours la même voilure qu’au commencement de la chasse ! Je parierais qu’il n’a pas perdu un seul détail de notre manœuvre.

— Allons, dit l’Hermite en s’avançant à grands pas vers le bord intérieur de la dunette, orientez sous la même allure que précédemment.

Il fallait être, comme l’était l’Hermite, un sublime esclave du devoir, pour oser reprendre cette allure ; car l’énorme poids de la voilure forçait si puissamment la frégate à chaque tangage, sa proue était submergée à une hauteur si effrayante, son gouvernail perdait tellement de son action, que nous nous trouvions exposés à un danger imminent.

Tout le monde à bord faisait à part soi ces tristes réflexions, quand un effroyable craquement dans la mâture vint suspendre les travaux de l’équipage. Les gabiers s’empressèrent d’abandonner leurs postes.

— C’est le bout-dehors de misaine qui est cassé ! héla tout de suite le lieutenant en pied.

— Y a-t-il des hommes atteints ? demanda vivement l’Hermite.

— Non, capitaine, personne.

— Alors ce n’est rien, rentrez la bonnette.

En ce moment, l’espar brisé, obéissant au battement répété de la bonnette, blessa plusieurs travailleurs et s’en fut déchirer la misaine. Un mouvement de confusion, presque d’épouvante, suivit ce malheur ; mais à la voix si puissante sur lui de l’Hermite, l’équipage retrouve bientôt son zèle et son sang-froid : en moins d’une heure et demie, la voile arrachée de sa vergue est remplacée et active de nouveau la marche de la frégate.

Pendant le cours des travaux nécessités par ces avaries – il