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— Que voulez-vous, monsieur Graffin ? lui dit l’Hermite.

— Rien, capitaine ; je croyais que vous m’aviez fait l’honneur de m’appeler par un signe de tête, voilà tout… Il paraît que je me suis trompé… eh bien, tant pis !…

- Pourquoi cela, tant pis ! Graffin ?

— Parce que, capitaine, si vous m’aviez appelé j’aurais probablement pu trouver le moyen de vous exprimer, imparfaitement sans doute, mais au moins avec l’accent du cœur, l’admiration que nous ressentons tous, nous autres officiers, pour votre admirable conduite… et le juste orgueil que nous éprouvons de servir sous un chef tel que vous…

— Mais, Graffin, répondit l’Hermite en accompagnant ses paroles d’un signe de tête plein de doute et de mélancolie tout à la fois, vous n’aviez pas besoin de mon appel pour venir me dire ces bonnes paroles…

— Pardon, capitaine, vous oubliez que le devoir ne me permettait pas de vous adresser le premier la parole… Oh ! sans cela… tenez, capitaine, voilà une demi-heure que je combats contre mon cœur en faveur de la discipline… Eh bien ! puisque vous êtes si bon pour moi, je me risque, et je vous avouerai tout… La discipline a été complètement vaincue, et je sais bien que vous ne m’avez pas appelé… Si j’ai saisi ce prétexte… c’est que je n’en pouvais plus…

L’Hermite, attendri par l’émotion qui faisait trembler la voix du noble jeune homme, lui prit la main et la lui serra longtemps sans prononcer une parole. Son grade l’empêchait d’exprimer les sentiments qui l’agitaient, et il devait se contenter de les laisser deviner.

— Venez avec moi, Graffin, lui dit-il après quelques secondes de réflexion ; pour l’honneur de l’uniforme français,