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HISTOIRE DU CANADA.

commandant en chef des armées de la république. Mais ces masses d’hommes étaient plus formidables sur le papier que sur le champ de bataille. Le gouvernement américain manquait d’expérience pour les faire mouvoir d’une manière dangereuse pour la sûreté des possessions anglaises, qui n’auraient pu résister à de pareilles forces si elles avaient été mises en mouvement avec la science et l’unité stratégique de l’Europe. Les 175 mille hommes armés des États-Unis excédaient toute la population utile du Canada capable de porter les armes.

Cependant le Canada se préparait à faire tête à l’orage avec un zèle et une confiance qui étaient de bon augure. Sir George Prevost en arrivant à Québec, alla visiter le district de Montréal et la frontière du lac Champlain ; il examina les postes fortifiés et les positions militaires de la rive droite du St.-Laurent. Partout la population était animée du meilleur esprit. Il y avait bien eu un instant quelques tergiversations parmi quelques jeunes membres de la chambre outrés de la conduite de Craig. Il y avait même eu une réunion secrète à Québec, chez M. Lee, où assistaient M.M. Viger, L. J. Papineau, Borgia, et plusieurs autres, pour délibérer s’il ne conviendrait pas de rester neutres et de laisser au parti qui dominait le pouvoir oppresseur qui nous gouvernait, à le défendre comme il pourrait ; mais M. Bedard et ses amis s’y étaient opposés et le projet avait été abandonné.

Le parlement se réunit deux fois en 1812. Le gouverneur lui recommanda de renouveler les actes nécessaires à la sauve-garde du gouvernement. C’était demander le renouvellement de la loi odieuse des suspects, dont la dernière administration avait tant abusé. La chambre répondit qu’elle s’en occuperait. Sir George Prevost s’empressa de répliquer qu’il ne pouvait s’empêcher de regretter qu’elle eût cru devoir arrêter son attention sur des procédés antérieurs ; qu’il l’engageait à porter ses soins sur l’état actuel des affaires, que c’était le moyen le plus efficace de manifester son zèle pour le bien public et d’assurer la tranquillité de la province. La chambre était bien disposée à accepter sa parole, mais elle voulait se mettre en garde contre l’avenir ; elle fit plusieurs amendements à la loi dans lesquels elle conféra au gouverneur seul le pouvoir confié jusque là au conseil exécutif, d’emprisonner les personnes soupçonnées de trahison, et statua