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HISTOIRE DU CANADA.

exécutif et des autres branches de la législature contre elle, soit en dictant ou censurant ses procédés, soit en approuvant la conduite d’une partie de ses membres et désapprouvant la conduite des autres, était une violation de ses privilèges et de la loi qui la constituait, contre laquelle elle ne pouvait se dispenser de réclamer, et une atteinte dangereuse portée aux droits et aux libertés du pays.

Après avoir ainsi protesté contre le langage du gouverneur, elle songea à se rabattre sur ses inférieurs.

Depuis longtemps la chambre voulait amener sous son contrôle les fonctionnaires publics, qui la narguaient par leur insolence et qui se croyaient fort au-dessus d’elle comme le marquaient leur conduite et leur langage. Ce mal qui a duré jusqu’à ces derniers temps, a puissamment contribué aux événemens politiques qui ont eu lieu plus tard. Les fonctionnaires se regardaient comme indépendans ; et les gouverneurs sans expérience politique pour la plupart, laissaient courir des remarques offensantes qui devaient revenir par contre coup sur l’exécutif lui-même. L’assemblée pensa que le moyen le plus efficace de porter les officiers publics à mieux respecter l’une des sources dont ils tenaient leurs pouvoirs, était de les amener sous son contrôle pour leur salaire comme ils étaient en Angleterre. Elle déclara que le pays était maintenant capable de payer toutes les dépenses civiles, et elle vota une adresse au parlement anglais pour l’informer que le Canada était prêt à s’en charger et en même temps pour le remercier de ce qu’il avait fait jusque là.

Les fonctionnaires tremblèrent de tomber sous le contrôle du corps qu’ils avaient insulté tant de fois dans leurs propos. Ils s’agitèrent pour faire repousser la mesure et communiquèrent leur zèle à leurs ami, qui s’efforcèrent de gagner le gouverneur à leur vue. Celui-ci surpris de la démarche de la chambre dans laquelle on voulait lui faire voir quelqu’embuche, ne put dissimuler son embarras. Il répondit que cette adresse lui paraissait d’une nature si nouvelle qu’il avait besoin d’y réfléchir ; que l’usage du parlement anglais voulait que les octrois d’argent fussent recommandés par le gouvernement avant d’être votés par la chambre basse, où ils devaient il est vrai prendre leur origine, mais non sans le concours de l’autre chambre ; qu’il était sans