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HISTOIRE DU CANADA.

la prospérité et livré à toutes sortes d’indulgences, n’est pas ce qu’il devait en attendre.

« Après la dernière mesure de conciliation proposée par le représentant du roi à l’ouverture de la dernière session de notre parlement, nous ne pouvons voir le retour qu’on lui a fait que comme l’œuvre de la plus incorrigible ingratitude. Mais il y a des gens dans le monde à qui les avantages que vous leur faites ne donnent que de l’insolence ». Sans répondre à ces insultes, le Canadien citait les faits analogues de l’histoire de l’Angleterre pour justifier l’opinion de la chambre sur l’indépendance des juges. Rapin, Blackstone, Locke et autres publicistes anglais lui fournissaient de nombreux extraits sur ce point et sur l’étendue des pouvoirs constitutionnels des trois branches de la législature. Le même journal s’étendit longuement sur les limites de leurs droits. Le représentant du roi, disait-il, a le pouvoir de dissoudre le parlement quand il le juge à propos, mais il n’a aucun pouvoir de faire des réflexions injurieuses, telles que celles contenues dans cette harangue, sur les procédés d’une branche de la législature qui est absolument indépendante de son autorité. Le respect dû à cette branche est aussi sacré et aussi inviolable que celui qui est dû à son excellence elle-même ; et ces réflexions viendraient d’autant plus mal de sa part, que c’est elle qui est chargée de faire observer le respect qui est dû à cette branche de la législature, ainsi qu’aux autres parties du gouvernement.

Pour mettre autant que possible le gouverneur à l’abri de ses coups, le Canadien feignait aussi de croire, suivant l’opinion de M. Bedard, à l’existence d’une administration responsable, à laquelle on attribuait le dernier discours du trône. « Cette harangue, observait-il, est une vraie disgrâce dans un pays britannique, et quand on fait réflexion que ce sont les conseillers privés de sa majesté et surtout ses officiers en loi, qui sont chargés par leur devoir du soin de dresser les harangues de ses représentans, et qu’on aperçoit sur le texte de cette harangue un renvoi à une note qui contient le nom d’un de ces conseils en loi, et qui le propose comme un modèle à tous les électeurs du pays, quelle idée doit-on avoir de l’origine d’une pareille pièce ? » Un correspondant écrivait plus tard : « Il paraît que la doctrine de nos ministres est changée. On doit se rappeler que les