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HISTOIRE DU CANADA.

même ne méritait pas que l’on brisât la bonne entente qui existait. Elle venait de nommer un comité pour s’occuper de cette question lorsque le parlement fut prorogé.

Sir Robert Shore Milnes déposa les rênes du gouvernement entre les mains de M. Dunn, qui convoqua les chambres pour la fin de février. L’humeur que les représentans avaient montrée vers la fin de la session ne s’était pas calmée dans l’intervalle. Ils voulurent sévir contre les journaux qui avaient critiqué leur vote au sujet de l’impôt, et décrétèrent de prise de corps, l’éditeur de la Gazette de Montréal. Celui du Mercury, journal établi à Québec l’année précédente, ayant voulu prendre sa défense, n’échappa à la prison qu’en reconnaissant sa faute. Aucune de ces infractions de privilèges ne méritait le châtiment qu’elles avaient provoqué et qui frappait au cœur la sauvegarde des droits populaires comme l’indépendance de la chambre elle-même en portant atteinte à la liberté de la presse. Mais à cette époque cette liberté était encore à naître, et ce n’était pas la faute du peuple s’il en était ainsi comme on aura bientôt occasion de le voir.

Cependant le parti mercantile qui connaissait l’influence considérable qu’il avait exercé de tout temps sur la métropole, pria le roi de désavouer le bill des prisons ; ce qu’apprenant, la chambre résolut aussitôt, sur la proposition de M. Bédard, de le prier de le maintenir, et transmit à Londres un mémoire explicatif de ses motifs. « Elle considérait, disait-elle, qu’il n’y avait aucun parallèle à faire entre les anciens pays de l’Europe et le Canada quant à la convenance de taxer les terres. Dans la mère-patrie et les pays où l’agriculture avait rendu les terres à peu-près d’égale valeur, une taxe territoriale pesait également sur toutes ; mais en Canada où l’agriculture laissait tant d’inégalité, une taxe par arpent comme celle qui était proposée, serait inégale et sans proportion, car celui dont le fonds ne valait que six deniers l’arpent payerait autant que celui dont le fonds valait soixante livres l’arpent. La taxe pèserait conséquemment plus sur ceux qui commençaient à défricher que sur les autres, et par là les nouveaux colons seraient chargés de la plus forte partie du fardeau, tandis qu’ils ne devaient recevoir que des encouragemens.

« Une taxe sur la valeur estimée de chaque terre serait pareil-