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HISTOIRE DU CANADA

brûla tout et ne laissa que des ruines et des cendres sur son passage.

Dans le Haut-Canada les Américains et les réfugiés de cette province qui s’étaient joints à eux, débarquèrent à Prescott, et prirent possession d’un moulin où ils furent obligés de se rendre au bout de quelque temps aux forces considérables qui les cernèrent. D’autres inquiétèrent la frontière tout l’hiver, attaquèrent Windsor, le Détroit et quelques autres points, mais n’exécutèrent rien de sérieux.

L’oligarchie qui avait été furieuse l’année précédente de ce qu’on ne s’était pas servi de l’échafaud pour punir les rebelles, ne voulait pas être trompée cette année. Elle voulait du sang. Elle voulait aussi faire un grand effet en Angleterre. Elle s’était fait armer avec la police dans les villes ; elle avait fait saisir toutes les armes qu’il y avait chez les armuriers. Elle fit suspendre trois juges canadiens dont deux à Québec, parce qu’ils ne voulaient pas violer la loi de l’habeas-corpus. Elle fit retrancher un grand nombre de Canadiens de la magistrature. « Pour avoir la paix, s’écriait le Herald, il faut que nous fassions une solitude ; il faut balayer les Canadiens de la face de la terre… Dimanche au soir tout le pays en arrière de Laprairie présentait l’affreux spectacle d’une vaste nappe de flammes livides, et l’on rapporte que pas une seule maison rebelle n’a été laissée débout. Dieu sait ce que vont devenir les Canadiens qui n’ont pas péri, leurs femmes et leurs familles pendant l’hiver qui approche, puisqu’ils n’ont devant les yeux que les horreurs de la faim et du froid. Il est triste, ajoutait ce journal hypocrite qui était dans la joie du sang, il est triste de réfléchir sur les terribles conséquences de la rébellion, de la ruine irréparable d’un si grand nombre d’êtres humains qu’ils soient innocens ou coupables. Néanmoins il faut que la suprématie des lois soit maintenue et inviolable, que l’intégrité de l’empire soit respectée et que la paix et la prospérité soient assurées aux Anglais même aux dépens de la nation canadienne entière. » Jamais Marat ne s’est servi d’un langage plus atroce.

Sir John Colborne revenu de sa courte campagne, organisa sans délai des conseils de guerre, et fit commencer devant les officiers de l’armée le procès des prisonniers qu’il ramenait et