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HISTOIRE DU CANADA

seil exécutif responsable, ce qui était absolument incompatible avec les rapports qui devaient exister entre la métropole et la colonie, vain jugement d’un homme d’état qui devait être démenti si peu de temps après.

Il était évident que les ministres pourraient entreprendre maintenant tout ce qu’ils voudraient contre le Bas-Canada, et qu’ils seraient appuyés. Ils en avaient fait une question de race, et avaient feint de se donner pour les protecteurs de cette minorité anglaise qui avait été le fléau de l’Irlande, disait O’connell. Ils ne faisaient d’ailleurs que rester fidèles à un principe de gouvernement bien connu surtout dans les colonies, contenir la majorité par la minorité. Le résultat des débats fut le même dans la chambre des lords, lorsque lord Brougham y présenta la pétition de l’assemblée.

Cependant le bureau colonial qui savait qu’il violait un principe sacré de la constitution en ordonnant le payement des fonctionnaires sans vote de la législature, n’était pas sans inquiétude, car lord Glenelg avait écrit à lord Gosford dès le mois de mars qu’il espérait qu’il n’y avait aucun danger de commotion ou de résistance, mais que par précaution on allait probablement lui envoyer deux régimens. Ensuite craignant que cette démonstration ne fît du mal, il permit à lord Gosford de tirer du Nouveau-Brunswick les troupes dont il pourrait avoir besoin.[1]

La sensation produite par le résultat des débats dans les deux chambres impériales, ne fut pas celle de la surprise en Canada. Les journaux qui soutenaient l’assemblée recommandèrent la fermeté et la persévérance ; soutinrent que l’oppression et la tyrannie que voulait imposer l’Angleterre ne pouvaient être durables en Amérique, que le gouvernement des États-Unis serait bientôt forcé d’intervenir, qu’en un mot l’avenir était au peuple ; qu’il fallait rester uni, qu’il fallait agiter, qu’il fallait cesser tout rapport commercial avec la métropole, qu’il fallait manufacturer soi-même les marchandises nécessaires à notre consommation, et ne rien acheter qui payât droit à la douane, afin d’épuiser le trésor, et d’obliger le gouvernement à suivre la volonté des représentans. On tint des assemblées publiques, surtout dans le district de Montréal, pour répandre les nouvelles idées

  1. Dépêches de lord Glenelg à lord Gosford, 6 et 16 mars, 1837.