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HISTOIRE DU CANADA.

chaque individu du peuple opprimant sur chaque individu du peuple opprimé toujours face à face avec lui.

La nouvelle de l’introduction secrète pour ainsi dire de ce bill dans les communes, fit une immense sensation en Canada. L’on cria à la perfidie, à la trahison ; et il ne resta plus de doute sur les motifs de la résistance du bureau colonial dans la question des subsides. On vit dès lors le but qu’il voulait atteindre. Mais il y avait encore quelque bienveillance pour nous en Angleterre.

Les journaux torys qui avaient gardé le silence jusque là, donnèrent, au mot d’ordre, le cri d’approbation, auquel les journaux libéraux répondirent en donnant l’éveil aux habitans, dont les institutions, les lois et la langue se trouvaient menacées d’une manière si inattendue. Toute la population s’agita d’un bout du pays à l’autre. On tint des assemblées publiques, on organisa des comités dans toutes les localités, pour protester contre la conduite du gouvernement de la métropole, et pour préparer des pétitions au parlement impérial et les faire signer par le peuple. Montréal et Québec donnaient l’exemple. Le jour de l’assemblée à Québec, les partisans de l’union se réunirent à Montréal sous la présidence de M. Richardson. Plusieurs assistans prononcèrent des discours dans lesquels ils s’abandonnèrent à tous les sentimens de haine qu’ils portaient aux anciens habitans, et que plusieurs avaient dissimulés longtemps, surtout ce même Stuart que la chambre avait désigné tant de fois pour être son agent en Angleterre, et qui vint donner le démenti à tous les sentimens qu’il avait professés avec ardeur jusque-là. « Les raisons des Canadiens, dit-il, ne peuvent être fondées que sur des préjugés qu’il faut extirper, ou sur des intérêts locaux qui ne doivent pas entrer dans la considération de la question, » comme si la langue, les lois, les institutions d’un peuple, « observait le Spectateur, pouvaient être mis au rang des préjugés. » Une partie des habitans des townships nouvellement établis sur les limites des districts des Trois-Rivières et de Montréal, sur la frontière américaine, imitèrent leurs compatriotes de Montréal. Mais il n’en fut pas de même dans le Haut-Canada. La majorité des habitans se prononça formellement contre l’union. Partout ils déclarèrent qu’ils étaient satisfaits de leur constitution, qu’ils désiraient la transmettre intacte à leur postérité, et que le bill