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HISTOIRE DU CANADA.

encore à celui-ci une prépondérance assez forte pour se faire respecter. La chambre voulait assurer à tous ses actes la plus parfaite indépendance. Elle ne voulait se laisser ni censurer, ni intimider. Il n’y a rien en effet de plus humiliant dans l’état colonial que les insultes prodiguées à la représentation par un gouverneur souvent inconnu d’elle et que l’intrigue ou le hasard a fait placer à sa tête. La censure portée contre la chambre par le duc de Richmond et la résolution qu’avait passée le conseil pour servir d’introduction à cette censure, furent évoquées, et l’on résolut presqu’à l’unanimité sur la proposition de M. Neilson, que c’était une violation des droits et des privilèges les plus incontestables de la chambre, et une usurpation de pouvoir contraire aux lois et tendant à renverser la constitution. Par une autre résolution la chambre maintenait son droit d’adopter, en votant les subsides, tel ordre ou tel mode qu’elle jugerait conforme à ses réglemens.

L’importance de cette question l’avait obligée de négliger beaucoup de mesures, et elle en communiqua les raisons au gouverneur par une adresse, en promettant d’en faire l’objet de ses premières délibérations à la session suivante. Dans une autre adresse elle lui signala une foule d’abus et de sinécures. Elle le priait de suspendre le paiement d’un salaire de £1500 accordé à un lieutenant gouverneur qui n’avait jamais mis le pied dans le pays, déclara inutile le salaire d’un autre nommé pour Gaspé qui ne résidait point non plus ; le priait de ne payer le salaire de £400 à un M. Amyot, secrétaire de la province, que lorsqu’il y remplirait ses fonctions, déclara la charge d’agent de la province à Londres, sans avantage pour le peuple, posa pour règle qu’aucun salaire ne devait être accordé aux conseillers exécutifs qui ne résidaient point dans le pays, que la réunion d’offices de juge à la cour d’amirauté et de juge à la cour du banc du roi, était incompatible sur la même tête ; que le cumul de ceux de juge de cette dernière cour et de traducteur français ou d’auditeur des comptes l’était encore plus ; enfin elle le priait de porter remède à tous ces griefs comme à celui le plus grave de tous pour la pureté de la justice, dont se rendait coupable le juge de l’amirauté, qui se faisait donner des honoraires par les plaideurs contrairement à la loi, tandis qu’il recevait un salaire de l’état. Ces