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HISTOIRE DU CANADA.

que le gouvernement se trouvant désormais obligé d’obtenir une liste civile pour la vie du roi, choisissait la première épreuve de la libéralité populaire pour la faire mettre sur un pied qui correspondit avec l’accroissement du pays, la chambre n’était point dans les dispositions convenables pour accueillir une pareille proposition sans de graves motifs. Loin de là, elle ne faisait tant d’efforts pour obtenir le contrôle du budget, que parce qu’elle croyait qu’il régnait de grands abus, et qu’au lieu d’augmenter la dépense il fallait la réduire. Le duc de Richmond était le dernier homme au monde pour régler une question financière, lui qui avait gaspillé une immense fortune. Il prit la chose avec hauteur, et le mécontentement de la chambre n’était pas de nature à se taire devant l’aspect menaçant du château. Les estimations furent renvoyées à un comité spécial, qui fit un rapport fort long et fort détaillé dans lequel il recommandait avec énergie l’économie et l’abolition de plusieurs charges inutiles ou purement nominales.

Comme dans une colonie le contrôle de la chambre sur le gouvernement est nécessairement plus fictif que dans une métropole, où il est en dernière analyse appuyé sur la volonté générale ; et comme dans une colonie aussi le gouvernement représente la mère-patrie, qu’il dispose de toutes ses forces, et peut dans le besoin se passer du concours des colons pour exister, il en résulte que ceux-ci sont obligés de prendre pour influencer l’exécutif, des précautions qui sont inutiles ailleurs. De plus, quoique la liste civile soit votée pour la vie du monarque en Angleterre, la somme est si petite relativement à la totalité du budget, qu’elle est à peine sensible, et que sans le vote annuel de la totalité, le gouvernement serait dans l’impossibilité absolue de marcher. Il n’en était pas de même en Canada. Avec la liste civile obtenue pour la vie du roi, le gouvernement pouvait facilement se passer des chambres ou les ajourner à la première difficulté sans éprouver d’embarras.

Ce sont ces considérations essentielles qui portaient la chambre à n’abandonner aucune de ses prétentions sur la question.

S’occupant encore plus du fond que de la forme, l’assemblée voulait obtenir par son contrôle sur l’argent, la plus grande influence possible sur l’exécutif ; elle avait obtenu le vote annuel des