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HISTOIRE DU CANADA.

roi, ou qu’il fit acheter sur sa propre responsabilité et les fit distribuer aux familles menacées de la famine. Cette attention parut indiquer un cœur qui avait quelque sympathie, et on voulut en tirer un bon augure.

En prenant les rênes du pouvoir il s’occupa de la question qui avait fait dissoudre le parlement, et écrivit aux ministres pour leur faire connaître l’état des esprits et pour demander des instructions sur la conduite qu’il devait tenir avec la chambre d’assemblée. Il l’informa que si la dernière dissolution avait été résolue en vue de changer le caractère de la représentation, elle avait entièrement manqué son but ; qu’elle avait au contraire, augmenté le mal en excitant une grande irritation parmi les représentans et parmi le peuple ; que presque tous les mêmes membres avaient été réélus, et que là où il y avait eu des changemens, on avait choisi des hommes encore moins modérés que ceux qu’ils avaient remplacés.

En Canada une pareille mesure devait dans presque toutes les circonstances produire plus de mal que de bien. Elle ne pouvait avoir l’effet qu’elle avait en Angleterre, où le système de la responsabilité ministérielle obligeait le gouvernement de marcher avec la majorité des communes.

Le bureau colonial était prêt à braver le ressentiment populaire à tout hasard ; et pour parer à toutes les éventualités, il donna les instructions nécessaires pour mettre, le gouverneur en état de marcher sans le parlement. Lord Bathurst lui manda[1] que, « si la nouvelle chambre était animée du même esprit que la dernière, ce serait en vain qu’on attendît d’elle les appropriations nécessaires, et qu’il lui envoyât un état des revenus de la couronne, en s’abstenant d’agir sur l’ordre qu’il lui avait donné de transporter les biens des jésuites aux syndics de l’institution royale, parce qu’on en aurait besoin pour payer les dépenses publiques.» Il approuvait entièrement sir Gordon Drummond d’avoir dissous le parlement, et si la nouvelle assemblée conservait le même esprit de résistance à l’autorité royale, Sherbrooke pouvait en faire autant. Mais tant qu’il paraîtrait y avoir d’autres moyens de résister à ses tentatives, il devait éviter de recourir à cette mesure extrême. « Jusqu’ici, disait-il, le gouvernement a

  1. Dépêche du 31 mai, 1816.