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DU CANADA.

semble interroger aujourd’hui secrètement sa pensée, partagée entre des idées d’indépendance future et absolue et de fraternisation avec ceux qui cherchaient ainsi à les expulser à jamais du continent. Ils firent offrir à leur métropole des secours en hommes et en argent ; et pour montrer leur bonne volonté, ils mirent immédiatement sur pied, en 1690, deux armées de deux mille hommes chacune pour envahir le Canada. Nous verrons bientôt de quel résultat fut accompagné le mouvement agresseur de ces colons déjà si ambitieux.

On a dû remarquer déjà que le caractère de l’émigration d’autrefois et de l’émigration d’aujourd’hui n’est pas le même. L’ancien colon américain n’est point l’image de l’émigrant qui débarque de nos jours sur les rivages de l’Amérique. Le premier s’exilant pour ne point abandonner des principes religieux ou politiques pour la défense desquels il avait combattu, et qu’il chérissait toujours, conservait malgré sa défaite ce respect pour l’honneur, cette fierté républicaine qu’il avait contractée dans des luttes dont l’empire devait être le prix. Le second, au contraire, n’est point une victime politique, c’est le fruit surabondant d’une société trop pleine et corrompue, que les vicissitudes du commerce, la centralisation de la propriété et les vices d’une organi-