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HISTOIRE

un bien plus grand nombre sans l’insubordination d’une partie de ses équipages.

Il trouva à son retour M. d’Iberville à Plaisance, qui n’avait pu aller le joindre faute de vivres ; mais qui venait d’en recevoir sur le Wesp et le Postillon, qui lui avaient aussi amené les Canadiens qu’il attendait de Québec. Ce dernier voulait commencer les opérations par l’attaque des postes anglais les plus reculés vers le nord, présumant qu’on y serait moins sur ses gardes qu’à St.-Jean. Ce raisonnement paraissait juste ; néanmoins M. de Brouillan s’y opposa. Jaloux de la réputation de son collègue, il suffisait que celui-ci suggérât quelque chose pour qu’il le désapprouvât. C’était un homme intelligent et expérimenté ; mais dur, violent, astucieux et avide. Ce dernier défaut le rendait odieux surtout aux pêcheurs, seule classe d’hommes qui fréquentait Terreneuve. Avec des talens supérieurs et autant d’expérience, M. d’Iberville était généreux et savait se faire aimer de ceux qu’il commandait ; aussi était-il très populaire et chéri du soldat. Il eût pu l’emporter sur son rival dans cette île, où, à un signe de sa main, tout le monde se serait déclaré pour lui ; mais il sacrifia sans hésitation son ambition et son ressentiment à la chose publique. M. de Brouillan ne pouvait rien faire sans les Canadiens, et M. d’Iberville