Page:Garin Le Loherain.djvu/20

Cette page n’a pas encore été corrigée

et de chacune d’elles s’élancent et ventèlent pennons et bannières. Les Sarrasins, de leur côté, s’arment à la hâte au son des cors et des trompes ; on s'ébranle de part et d’autre. Quel fracas à la première rencontre ! Combien d’écus percés, de hauberts troués, de chevaliers abattus, de sang répandu, de têtes ouvertes ! Parmi les meilleurs bacheliers de la bataille d’Hervis, on remarquait celui qui avait la garde de l’enseigne ; il était du lignage du Duc ; on ne l’appelait que le vilain Hervis, parce qu’il était bâtard et qu’il avait été longtemps fort pauvre ; mais le Duc l’aimait sur tous les autres, en raison de sa grande prouesse. C’est avec l’aide de ces hardis bacheliers que le Duc put soutenir toutes les attaques. Il fait quitter le champ à deux batailles ; il allait disperser la troisième quand survint Aucaire, un roi sarrasin que Dieu confonde ! De sa bataille partait une grêle de traits meurtriers. Hervis presse les flancs de son cheval, brandit son épieu, atteint Aucaire, lui perce le cœur et l’abat mort sur le sable. Il fallait voir alors la douleur et l’effroi des Païens : « Où fuir ? » disaient-ils , « c’est un diable à qui nous avons à faire. Nulle arme ne dure contre son épée. Puisse notre dieu le confondre ! »

Les Loherains, toujours plus ardents à la tuerie, avancent encore. Hervis laisse courir son cheval au milieu des rangs ennemis, et les bacheliers se pressent à l’envi pour le défendre. On voit dix, vingt et trente mêlées. C’en était fait des Sarrasins, quand un nouveau secours leur arrive. C’est Godin, leur souverain seigneur, Godin qui seul vaut dix chevaliers. Ses armes sont fortes, son cheval vigoureux et rapide. Une tète de mâtin est figurée sur son écu, et trois mille guerriers foraient sa bataille. Il s’abandonne sur les compagnons d’Hervis, et là frappe, coupe, éventre et désarçonne. Malheur à qui veut l’attendre ! Il immole Gerart. Berenger, Hugon, Landri ; enfin, d’un coup d’épée il abat