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Toutefois, quelques sages disent qu’Aurangzeb, qui traita si durement les souverains du Décan, malgré leurs réclamations, et qui avait fait creuser la mosquée de la Mecque (pour en enlever le trésor), a pris sur son cou une action blâmable. Dieu sait quelle rétribution est réservée à cet acte. Le fait est qu’on peut ajouter encore qu’avant de conquérir le Décan, les impôts et les contributions arrivaient à Aurangzeb de cette contrée, et il était appelé Roi des rois (schahin schah) de l’Hindoustan. Toutefois, l’argent provenant de cette vexation (qu’il fit éprouver à Tana) lui parut énorme, et il semble que par cette mesure, qu’il crut de bonne administration, il ait voulu s’élever en dignité.

 » Vers. — Les rois sont instruits des difficultés de l’empire. Toi, pauvre malheureux, du coin où tu es assis, n’aie pas la prétention de rien dire de bien.

» Bref, on attribue au schah élevé Abu’lhaçan Tana Schah, ce matla’[1], et, à cause du langage du Décan et de la facture antique qu’on y remarque ; feu Ali Ibrahim Khan[2], qui l’avait entendu réciter, l’avait retenu. Voici ce vers :

 » À quelle porte irai-je dire (ma peine) ? Où pourrai-je aller ? Adressons-nous à mon propre cœur qu’il soit pour moi mon mihrab[3]

Si mes amis me disent seulement une parole, ce sera pour moi comme un frais pavillon dans la saison d’été. »

Quoiqu’il y ait plus de poèmes de longue haleine dans le dialecte hindoustani du midi ou dakhni qu’en celui du nord ou urdu, dans lequel on a plutôt écrit des gazals, des

  1. C’est ainsi qu’on nomme le premier vers d’un poème.
  2. Le biographe auteur du Gulzar-i Ibrahim.
  3. Niche vers laquelle on se tourne pour prier dans les mosquées.