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voiture et en palanquin dans les rues de Calcutta ; et même un bâbû[1] a introduit le Prince dans son zanâna, au grand étonnement des habitantes de l’endroit. Il paraît toutefois que cette sorte d’exhibition a été l’objet d’une comédie (bengali farce) intitulée « Jaganand et le Prince », représentée au « National Theatre », pièce non-seulement, dit-on, indécente, mais insultante pour Son Altesse Royale, pour les dames européennes, pour le babu dont il s’agit, et pour sa famille[2]. Mais aussi le gouvernement en a-t-il arrêté la représentation par mesure de police.

À Lahore, le Prince de Galles reçut cent vingt membres de l’ancienne maison royale de Delhi[3], et aussi des princes de l’Afganistan, des descendants de Nanak, fondateur de la religion des Sikhs, et de Govind, qui en fit une nation militaire. Malgré la défense expresse qui leur en avait été faite, beaucoup de chefs indigènes offrirent leurs nazars[4], et il fallut pour les satisfaire que le prince les touchât.

À l’occasion de la visite du Prince de Galles au Cachemyre, le maharaja mit en liberté tous les prisonniers, afin,

  1. Le journal hindi appelé Amrita bazâr patrika, mentionné dans ma « Revue » de 1870, p. 32, attaque violemment ce babu nommé Jaganand, au sujet de cette dérogation à l’étiquette indienne ; mais l’Awadh Akhbâr du 23 janvier 1876 prend sa défense.
  2. « Indian Mail » du 25 mars et du 1er avril 1876.
  3. On trouve à ce sujet dans le Panjâbi du 1er avril 1876 l’article suivant, dont, je lui laisse la responsabilité : « Lorsque le Prince de Galles devait aller à Delhi, les princes de la famille royale lui firent tenir une pétition pour lui demander le payement de leur pension. Le Prince de Galles prit connaissance de leur situation par l’entremise du commissaire, et il est étonnant qu’il n’ait adopté aucune mesure à ce sujet. Évidemment, la situation des princes de Delhi, qui avaient été élevés avec délicatesse, est maintenant telle, qu’ils sont même dans le cas de manquer de pain. Il y en a, en effet, qui s’appellent Schâh ’âlam « Roi du monde », et qui demandent l’aumône. Il faut absolument qu’on ait pitié d’eux, qu’on éloigne du cœur l’inimitié, et qu’on la remplace par la compassion et la justice. »
  4. Présent offert en signe de dépendance. Le mot est arabe : son synonyme indien est bhenth.