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un Anglais cultivé, qu’il est animé d’excellentes intentions vis-à-vis de l’Inde et qu’il désire faire ce qui est juste. Mais pour remplir le poste important qu’il occupe, il faut posséder d’autres aptitudes que les siennes. Lord Chelmsford a certainement fait preuve de manque d’imagination. Il applique à ses fonctions dans l’Inde les traditions d’un gouverneur colonial constitutionnel qui doit invariablement se laisser guider par ses ministres et qui agit sur la politique de la colonie (s’il agit quelque peu sur elle), uniquement en exerçant une influence subtile par ses relations sociales. Le Gouverneur des colonies qui se gouvernent elles-mêmes procède par suggestions aimables qu’il n’impose jamais à ses ministres. Il essaye d’agir sur l’opinion publique, non point en exerçant son autorité, mais en se faisant des amis indirects, aux réunions sociales et à demi-politiques. Les qualités mêmes qui faisaient de Lord Chelmsford un Gouverneur parfait le rendent impropre à remplir le poste de Vice-Roi. Le vice-Roi des Indes a un pouvoir immense. C’est un autocrate à la tête du Conseil Exécutif. Une simple proposition émise par lui a la valeur d’une sanction légale. Il fait et dirige la politique. Il surveille, avec le droit réel d’intervention, l’administration des provinces. Il faut donc qu’il soit un maître ferme, doué d’une grande imagination, de sympathie pour le peuple et qu’il ne craigne pas de la laisser voir. Malgré toutes ses qualités de cœur, Lord Chelmsford s’est montré faible, aux moments critiques. Au lieu de guider ses collègues, il s’est laissé commander par eux. Il a laissé les administrateurs de ses provinces agir à leur guise. Il en est résulté une diversité de politiques : un gouvernement paisible et