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LE DOCTEUR OMÉGA

— Vous le saurez plus tard… je vous demande si vous êtes un homme courageux.

— Certainement, répondis-je en cambrant la taille et en fronçant le sourcil.

— Avez-vous quelquefois eu peur dans votre vie ?…

— Jamais !… mentis-je avec aplomb.

— C’est bien, dit le docteur… vous êtes celui que je cherchais… Comment vous appelez-vous ?

— Denis Borel…

— Venez me voir ce soir… à neuf heures.

— Là ?… fis-je en désignant du doigt le hangar demeuré debout malgré la catastrophe.

— Oui… là… Vous sonnerez à cette petite porte… mais, je vous préviens, sonnez fort… car je suis un peu sourd… allons, au revoir… à ce soir, mon ami !…

Et le docteur me serra la main.

Ce contact me fit un effet désagréable.

J’eus comme la sensation d’avoir touché une peau de serpent…

Mon ami !… Il m’a appelé son ami !… pensais-je en m’en retournant…

Du diable si je me rends à son invitation ! cet homme est tout simplement un fou…

S’il voulait causer avec moi… il pouvait le faire à l’instant. Ah ! s’il se figure par exemple que je vais venir dans sa baraque en pleine nuit… il se trompe.

Je ne me soucie guère de passer une soirée avec un dément…

Rentré chez moi, je déjeunai de fort bon appétit et, dans l’après-midi, je jouai du violon pendant deux heures.

J’exécutai à ravir la Ronde des Lutins de Bazzini… et il me sembla même que mes pizzicati pouvaient presque rivaliser avec ceux de Jan Kubelik.