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LE DOCTEUR OMÉGA

une grosse tête de nègre, et cela avait quelque chose de grotesque et de lamentable.

Plus loin des livres étaient éparpillés… un vieux chapeau haut de forme et une robe de chambre rouge accrochés à une cloison branlante.

Autour du lieu de l’explosion la terre était crevassée, labourée… quelques arbres avaient été coupés à ras du sol.

J’étais occupé à contempler ce triste spectacle quand une petite voix joyeuse s’éleva tout à coup.

Je me retournai d’un bond et me trouvai en face du docteur Oméga…

Il me salua en souriant, mais il me parut qu’il y avait dans cette amabilité quelque chose d’ironique et de cruel.

— Hein ?… fit-il avec un ricanement aigu, cela a merveilleusement sauté !

— Oui… en effet… balbutiai-je… et il est fort heureux qu’il n’y ait pas eu de victimes…

Le docteur parut ne pas entendre cette réflexion.

Je m’enhardis.

— Vous êtes sans doute inventeur, monsieur ? lui dis-je.

Il fit un signe de tête affirmatif.

J’allais lui demander en quoi consistaient ses inventions, mais je n’osai pas.

Je ne pouvais cependant le laisser partir ainsi ; il fallait qu’il s’expliquât.

Heureusement, j’eus un trait de génie.

— Moi aussi, m’écriai-je, je suis… inventeur…

Le vieillard me regarda quelques secondes avec attention, et il faut croire qu’il fut satisfait de cet examen, car un petit sourire plissa sa grosse face glabre. Me posant brusquement la main sur l’épaule, il me fit cette question inattendue :

— Êtes-vous un homme courageux ?

— Pourquoi cela ?… interrogeai-je, assez inquiet.